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Cher membre du Club,

Vous avez fait la connaissance de Guy Spier il y a quelques jours. Son profil me passionne : investisseur « value » de long terme, disciple de Warren Buffett avec une particularité :

Rien ne doit le distraire !

Une discipline de la concentration qui vaut à son fonds Aquamarine Capital de gérer quelque 350 millions de dollars.

Et si vous pouvez vous inspirer de ses 4 premiers « commandements », je vous propose d’aller aujourd’hui au plus concret en observant directement ses investissements !

Et comme promis, je vous décrirai les 4 derniers commandements en plus du portefeuille.

Comme ça, vous aurez tout.

L’Amérique : je veux l’avoir et je l’aurai

« Don’t bet against America » (ne pariez pas contre les USA), est un des principes chers à Warren Buffett, qu’il répète souvent dans ses lettres aux actionnaires de sa société Berkshire Hathaway.

C’est justement Berkshire Hathaway qui occupe la 1ère place du portefeuille de Guy Spier : à 30% en comptant les actions classe A et B (actions identiques – la B est moins chère).

Composition du fonds Aquamarine Capital de Guy Spier

Le reste du portefeuille y ressemble : les leaders de l’industrie financière américaine sont largement représentés avec Amex et Mastercard pour 29%, Bank of America 11%, et l’agence de notation Moody’s à 5%.

La diversification est respectée avec des lignes dans la tech : Alphabet (Google) à 1% et Micron Technology (semiconducteurs, 5%) – et aussi dans la presse (Daily Journal à 2%).

Plus surprenant, mais plaisant : 13% du portefeuille est investi dans le constructeur italien Ferrari,et 2% dansle géant chinois de l’e-commerce Alibaba.

Quand la diversification géographique complète la diversification sectorielle… Libre à vous de copier ce portefeuille. Mais le plus important à suivre, ce sont les règles.

Commandement #5 : Ne parlez pas avec des personnes en conflit d’intérêt

Cette règle semble aller de soi – ce qui est plus difficile est de déterminer qui a un intérêt pour ou contre la position sur laquelle vous voulez agir.

On a déjà dit que Guy Spier ne parlait ni au management, ni à quiconque veut lui vendre un dossier.

Mais cela va plus loin. Il établit des règles de discussion avec son « cercle de confiance » (parce qu’il faut quand même bien parler avec des gens !). Typiquement, il préfère parler de ses placements avec des investisseurs de long terme, comme lui.

Des interlocuteurs qui accepteront les règles de conversation suivantes :

  • Confidentialité de l’échange
  • Personne ne dit quoi faire à l’autre – l’échange reste objectif
  • Les interlocuteurs doivent se faire confiance
  • On ne parle pas avec quelqu’un avec qui on est en affaires.

Restez concentrés, car ce n’est pas fini.

En français : Les gens vous empêcheront toujours de faire ce qui est juste si c’est non conventionnel.

Commandement #6 : On agit quand le marché est fermé

Guy Spier prend ses décisions et passe ses ordres hors marché, pour ne pas risquer d’influencer son cerveau avec des informations de court terme.

Et c’est vrai : le moindre mouvement sur une valeur pousse à agir d’une manière ou d’une autre.

Je veux acheter telle action après avoir fait une semaine de recherche. Je sais qu’elle est fondamentalement bonne, mais aujourd’hui, elle perd 3% ! Ne devrais-je pas attendre qu’elle perde plus ? Et si elle gagne 3%, ne devrais-je pas en acheter encore plus ?

C’est un peu risible ! Mais je me retrouve bien dans cet exemple (à mes débuts).

Évitez-vous cela et passez vos ordres entre 18h et 9h du matin (pour la Bourse de Paris).

En français : Pour la plupart des gens, acquérir la clarté intellectuelle et le détachement émotionnel nécessaires à l’investissement est difficile.

Commandement #7 : Le sang-froid ça dure 2 ans

Si vous achetez une action et qu’elle s’effondre juste après l’avoir achetée, ne la vendez pas avant 2 ans.

C’est TRÈS dur.

Mais Guy Spier est un long termiste, un « value ». Il achète parce qu’il SAIT que la société est fondamentalement valable, et non pas parce qu’il CROIT qu’elle va monter en bourse.

Donc si vous avez fait une bonne recherche sur une valeur, et qu’elle perd 30% en 1 semaine, débranchez votre cerveau émotif.

Ce n’est pas de l’acharnement du type « pas vendu, pas perdu ». C’est une question de cohérence avec votre stratégie.

De toute façon, vous êtes là pour plusieurs années. Donc laissez sa chance à votre transaction, et attendez plusieurs trimestres. La bourse est cyclique et vous favorisera si votre recherche est bonne.

Anecdote personnelle : j’ai acheté (un peu cher) une valeur US au début de l’été. Les fondamentaux sont bons, la croissance est forte. Un dossier de long terme.

Mais elle s’est littéralement écroulée depuis 3 mois, la faute au retournement de cycle sur les marchés US et à sa petite taille.

Heureusement ça m’arrive très rarement, et surtout c’est une petite ligne (inférieure à 5% de mon portefeuille). En préparant cet article, j’ai arrêté de m’inquiéter. On verra bien dans 2 ans !

Commandement #8 : ne parlez pas de vos investissements actuels

Ce n’est pas par secret, ou par discrétion.

C’est juste que de parler de vos investissements va nécessairement vous faire gamberger.

Cela peut jouer sur vos convictions. Guy Spier craint ce qu’il appelle le biais d’engagement.

Supposez que vous avez considéré un investissement dans une valeur et qu’après analyse du dossier, vous décidez d’écarter le projet.

Si vous en avez parlé, vous allez faire face à de l’étonnement, voire de la critique. « Il n’est pas capable d’aller au bout » … « Il ne fait pas ce qu’il dit », etc.

Comme face à des enfants qui vous disent « mais t’avais promis ! ». Et tout le risque est là. De vous sentir redevable de votre intégrité, d’assumer quelque chose que votre raison vous interdit de faire.

Et d’acheter une action que vous ne devriez pas.

Guy Spier ne parle de ses actions que « post-mortem » à ses investisseurs. Il donne volontiers tous les détails demandés, mais uniquement une fois qu’il a vendu.

En français : L’investissement dans la valeur exige de savoir identifier les erreurs de perception de la foule pour en tirer profit.

Et si vous manquez aux 8 commandements ?

Guy Spier donne ses 8 règles personnelles. Celles qu’il suit au quotidien.

Il est assez obsédé par la concentration, il a par ailleurs choisi de vivre dans une maison isolée du reste de la ville à Zürich, pour éviter « le bruit ».

Il n’impose à personne de suivre son ascèse cérébrale. Mais je trouve que parmi les 8 commandements, il est utile de suivre ceux auxquels vous croyez fermement en tant qu’investisseur.

De mon côté, j’essaie de suivre les règles 1, 4, 6 et 7 : ne pas regarder les cours, faire ma recherche, acheter hors marché et (la plus dure) ne pas vendre face à la panique.

Et vous ?

Je vous reparle très vite.

D’ici là, visez juste et placez bien.

Felix Baron